Photo : Hervé Machi Dr Jacques Lucas,
vice-président du conseil national de l’Ordre des médecins, chargé des systèmes d’information en santé.
Vous allez publier un nouveau livre blanc intitulé « Déontologie médicale sur le web ». Quel est l’objectif de ce travail ?
La publication de ce document s’inscrit dans la continuité de nos trois livres blancs précédents sur l’informatisation de la santéla télémédecine et la dématérialisation des documents médicaux. Notre objectif est d’accompagner le développement des TIC dans le champ de la santé, en y imprimant l’éthique et la déontologie médicales. Nous faisons dans ce nouveau Livre blanc des propositions concrètes pour inciter les médecins à renforcer leur présence professionnelle et humaniste sur le web. Nous exposons également comment ils pourraient y trouver plus facilement des informations pertinentes pour répondre à leurs propres besoins professionnels et leur formation permanente, hors conflits d’intérêts..

Une de vos propositions est de mettre le web au service de la relation médecins-patients. Est-ce possible ?
C’est fondamental. L’utilisation du web santé par les patients est massive. Nous considérons que le médecin doit aider les patients à s’orienter vers des sites pertinents et fiables, en donnant son avis sur les contenus que le patient aura lus sur le web, en conseillant des sites de référence, voire en publiant facilement son propre site professionnel, et que ce ne soit pas chronophage.

Vous souhaitez également que les médecins contribuent à produire de l’information en santé. Pourquoi ?
Oui, nous encourageons les médecins à prendre toute leur place sur la Toile, car ils représentent la source d’information la plus fiable aux yeux des patients, et qu’ils ont un devoir d’information. Nous explicitons cela, afin que ce ne soit pas considéré comme de la publicité. Les règles de déontologie que nous rappelons sont simples et pourront être vérifiées par l’internaute.

Vous appelez à un usage responsable des médias sociaux. Qu’est-ce que cela signifie concrètement ?
L’usage des médias sociaux numériques ira croissant dans le domaine médical et médico-social. Il faut garder à l’esprit que ce sont des lieux d’expression publique. Cela implique, au regard de la déontologie médicale : la mesure des propos, l’humanisme, le respect des personnes, la responsabilité dans la citation des sources… Ce qui n’exclut en rien les convictions, les émotions, la force des arguments, la liberté d’expression. Nous donnons un certain nombre d’orientations concrètes en ce sens, par exemple sur l’usage du pseudonyme.

Vous vous exprimez également sur le « téléconseil ». Comment définissez-vous cette pratique ?
Le téléconseil recouvre une pratique qui consiste à mettre à disposition, le plus souvent à titre onéreux, une information personnalisée à la demande d’un internaute non connu. Lorsque cela est effectué par un médecin, il s’agit clairement d’une prestation médicale qui engage totalement sa responsabilité civile et déontologique. Nous demandons donc à la puissance publique de réglementer cette activité, avec les aspects déontologiques que nous exposons.

Vous préconisez aussi la reconnaissance de l’acte de conseil par téléphone ou par courriel pour des patients déjà suivis par le médecin…
En effet. Cela est d’ailleurs l’autre versant de ce que je viens de dire. Devant l’augmentation des malades chroniques, comme de la dépendance, les médecins passent un temps de plus en plus important à adapter les traitements de leurs patients, par contact téléphonique ou par courriel. Il est indispensable que cela soit reconnu, sécurisé et valorisé. C’est notoirement le cas en médecine de premier recours. Mais ce n’est pas exclusif, les exercices spécialisés et hospitaliers sont également concernés.